Tunisie: Un mois de ferveur et de divertissement
· Prières et animations: Des soirées jusqu’à l’aurore
· Cette année: Jil Jilala, au programme du festival Al Madina de Tunis
· Shorba, l’abrik, kamounia, kaftaji… les mets prisés
Tunis connaît un engouement sans pareil pour la religion et un regain de ferveur durant le mois sacré. Dans la capitale tunisienne, la piété se traduit par l’affluence massive des fidèles dans les mosquées au point de faire la prière dans les rues qui avoisinent les lieux de culte. Prêches, prières, hadiths, psalmodies, charité… Tout le monde y trouve son compte. La mosquée de Zeitouna, vieille de plus de 13 siècles, est très sollicitée pour les Tarawihs. Ce monument à mi- chemin entre Al Azhar au Caire et Al Quarawiyyine à Fès illustre parfaitement le rayonnement en matière de sciences théologiques et le ressourcement religieux en Tunisie. Chaque année, à l’occasion du mois sacré, on y organise un concours international de psalomodies. De nombreux pays arabo-musulmans y participent chaque année.
Dans les rues de Tunis, le retour en force du référentiel religieux se traduit aussi par la réapparition du port du voile chez les femmes et jeunes filles qui l’arborent en dépit de son interdiction dans les bureaux et les établissements scolaires. Ce phénomène s’accentue davantage au milieu du mois sacré et le 27e jour. Chez les hommes, c’est le come-back des gandouras, jebba, chachia (couvre-chef en laine) et autres costumes traditionnels.
Comme quoi, même les codes vestimentaires changent et annoncent les traits du mois sacré. Dans la capitale, Ramadan est le mois du repentir pour les uns, mais aussi de la convivialité et de la joie de vivre pour les autres. Le soir correspond à un mois de réjouissances, de plaisirs culinaires et de divertissement. Familles et amis se retrouvent pour le rituel de l’Iftar et concoctent des programmes pour la soirée, souligne une Tunisienne. A l’extérieur, les rues commencent à s’animer dès les premières heures qui suivent la rupture du jeûne. Différents quartiers vibrent aux rythmes de chants folkloriques, percussions ou encore les Mouachahets, Malouf (l’équivalent du Malhoune), musique soufie et autres «Kalthoumyates». Orchestres populaires, Aouada (troupes folkloriques), troupes de théâtre… l’animation bat son plein tous les soirs. Pour la circonstance, Tunis a son festival du mois sacré: baptisé le festival de la Médina, c’est un événement haut en couleur dont la musique traditionnelle ou à caractère spirituel domine. Des têtes d’affiche sont programmées chaque année. Outre le Tunisien Lotfi Bouchenak, l’Argentine Julia Migenes Johnson qui a chanté dans la célèbre opérette de Carmen, José Fernandez (Gospel)…
Non loin du festival, les grandes avenues ne connaissent pas de répit. Les cafés et salons de thé affichent complet. Des programmes à la carte: animation, orchestres, karaoké, voire jeux de cartes et chicha. «Les filles et les femmes commencent à en fumer à volonté dans les salons de thé modernes, c’est tendance», explique une Tunisoise. Les assidus des jeux de cartes sont plutôt nombreux et plus âgés dans les quartiers populaires, plus chaleureux et plus animés. Ce sont généralement, des retraités. Les parties sont interminables, elles peuvent se poursuivre jusqu’à l’aurore. Côté jeunes, c’est le m’as-tu-vu sur les terrasses. La banlieue nord de Tunis, notamment à Sidi Boussaïd, des milliers de noctambules se donnent rendez-vous le soir, loin du vacarme urbain.
En plus des prières et du divertissement, les repas du mois du jeûne incarnent aussi l’alliance des contraires. Autant, le jeûne est un exercice de l’abstinence, de la faim et des privations du lever au coucher du soleil, autant le soir est l’occasion de se faire plaisir sur le plan culinaire. En témoigne la table de l’Iftar à Tunis. Elle est assez variée et riche. La tradition est de rompre son jeûne par des dattes. Il y a un ordre particulier pour les différents plats. Après les dattes et le lait, vient la Chorba, une soupe de pois chiche, de viandes et céréales (blé, orge…). A Tunis, l’on raffole de l’brik.
C’est une feuille farcie d’une garniture à base de pommes de terre cuites et broyées, d’œufs et de viandes ou thon. A cela s’ajoute la bssissa, un breuvage rafraîchissant. Servi en même temps que le f’tour, le dîner est tout aussi consistant. Les salades tunisiennes sont généralement assez classiques. Le pot-au-feu épicé avec légumes et l’incontournable lahrissa (sauce piquante) suivent l’brik. La cuisine tunisienne est très épicée et riche en sauces. Le plat connu de «lahmate» est une autre spécialité locale consommée pendant le mois sacré. Ce sont des grillades de viandes au fromage gratinées. La kamounia n’en est pas moins réputée; un plat à base de foie, cœur et viande… Le kaftaji est tout aussi prisé.
C’est un mets composé de pomme de terre, de tomates et courgettes frites et râpés avec des œufs et mélangés avec le foie d’agneau et la viande hachée.
Source : L’Economiste
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