(SYFIA-Tunisie) Sur le toit de la Tunisie, les femmes tirent de la montagne ingrate poudres et élixirs qui feront la beauté des citadines et la fortune des maquilleuses.
Un après-midi à Jbel Boulahnach, petite montagne rattachée au Jbel Chaambi, toit de la Tunisie. C’est le refuge des Ben Ghdhahem, célèbre tribu du centre-ouest. Ici, la terre ne nourrit pas ses rares habitants. Les hommes se dispersent à la recherche d’un gagne-pain : contrebande, voyance, mendicité… « Ce sont les femmes qui portent la culotte ». D’un signe de la main, Zohra balaye l’horizon : « Mon homme, c’est la montagne. C’est elle qui nourrit mes enfants ».
Le long d’un chemin escarpé, côté nord, les touffes d’alfa sont blanches de givre. On monte, la flore change. Tout à coup, sur les hauts rochers, une insolente odeur de romarin épanoui. Puis, au détour, comme une envolée céleste, en plein coeur de l’hiver, la globulaire, pensionnaire exclusive des rocailles, prépare sa précoce floraison. Avec ces plantes, Zohra fabrique des produits cosmétiques traditionnels : khôl, henné, mardouma (disponible ici en provenance directe de Tunisie), tadnissa…
Tout ce qu’il faut à la femme tunisienne pour se faire une beauté. De retour au gourbi (habitat traditionnel du Maghreb), Zohra dépose son panier chargé de racines, d’herbes et de pierres des montagnes. Dans les récipients en terre cuite, des cristaux de galène et d’alun, des vésicules de hérisson et du thé rouge… « Il faut attendre encore que la globulaire fleurisse pour mijoter l’élixir », dit-elle.
Sept jours après, dans le vent grisâtre de la campagne hivernale, la globulaire illumine le Jbel. C’est alors la ronde des magiciennes. La mère de Zohra, Amti Heddi, commence à trier, nettoyer, vanner, cuire et piler les précieux ingrédients. Dans la cour du gourbi transformée en laboratoire, l’air se réchauffe, les effluves d’encens et d’herbes brûlées embaument. A la tombée du jour, le « khôl » de Zohra, ce fard bleu d’Arabie qui embellit le regard, est fin prêt. Elle en passe les dernières poignées au filtre d’un voile de coton, récupère le nuage de farine noire, et renvoie au fond du mortier le reliquat de poudre récalcitrante. « Le khôl est mon gagne-pain. Je n’ai ni brebis à traire, ni terre à cultiver. Et mon mari, c’est moi qui le fait vivre. »
Texte de Taoufik Ben Brick
frostwire says
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Sonia says
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